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Smart #5 : un gigantisme assumé

la Smart #5

La Smart telle que nous l’avons connue pendant plus de vingt ans, citadine minuscule pensée pour se faufiler dans les ruelles étroites, appartient pour l’instant au passé. Avec la nouvelle Smart #5, la marque d’origine allemande, aujourd’hui pilotée conjointement par Mercedes-Benz et le groupe chinois Geely, franchit un cap décisif. En attendant le retour d’une Smart plus compacte (la marque présentera une #2 conçue pour l’Europe en 2026), place à un imposant SUV électrique qui change complètement l’image de la maison. Après la #1 et la #3, la #5 représente la troisième étape de cette mutation. C’est aussi la plus spectaculaire, tant ce modèle rompt avec les codes historiques de Smart et affirme de nouvelles ambitions : devenir un acteur crédible du marché des véhicules électriques familiaux haut de gamme.

la Smart #5
Le SUV sino-germanique adopte les codes du baroud / The good click

Une Smart dans la cour des grandes

Jamais la marque n’avait produit un véhicule d’une telle taille. Avec 4,70 mètres de long, 1,92 mètre de large et 1,70 mètre de haut, la Smart #5 occupe sans complexe l’espace d’un SUV familial. On est loin, très loin de la Fortwo originelle, puisque les 2,70 m. cette dernière tiendrait dans l’empattement généreux de 2,90 mètres de la #5. Cette emprise au sol lui confère une silhouette équilibrée et surtout une habitabilité remarquable. Le coffre arrière peut accueillir jusqu’à 630 litres de bagages, et il se transforme en véritable soute de 1 530 litres lorsque la banquette est rabattue. À l’avant, un second compartiment de 47 à 72 litres selon les versions, permet de ranger câbles et petits objets. La Smart, autrefois symbole de minimalisme, devient ici synonyme d’espace et de polyvalence.

Visuellement, la #5 revendique clairement son identité de SUV moderne et robuste. Sa garde au sol de 197 millimètres, ses passages de roues marqués et ses grandes jantes – jusqu’à 21 pouces sur la version Brabus – lui donnent une allure musclée. Le dessin reste assez cubique, mais les arrondis qui adoucissent les angles là rendent presque élégante. L’allure évoque les baroudeuses prêtes à partir à l’aventure, même si la vocation première de la #5 est bien plus routière qu’off-road. L’architecture et le calibrage de son châssis privilégient avant tout le confort et l’efficacité sur route, plutôt que la conquête des sentiers.

la Smart #5

La gamme : riche, technique et ambitieuse

Sous ses airs massifs, la Smart #5 est intégralement électrique. L’offre débute avec la version Pro, équipée d’une batterie lithium-fer-phosphate de 74,4 kWh nets fonctionnant sous 400 volts, associée à un moteur arrière de 340 chevaux. C’est déjà une puissance considérable pour un modèle d’entrée de gamme, mais Smart ne s’arrête pas là. Les versions supérieures passent à une architecture 800 volts et embarquent une batterie nickel-manganèse-cobalt de 94 kWh nets. Avec cette configuration, la marque propose une propulsion de 363 chevaux, une déclinaison à transmission intégrale de 588 chevaux, et surtout une version Brabus portée à 646 chevaux et 710 Nm de couple. Cette dernière signe un 0 à 100 km/h en seulement 3,8 secondes et atteint 210 km/h en vitesse de pointe, des performances dignes d’une sportive de haut rang. Du moins pour l’accélération, car côté freinage on reste loin de disposer de la capacité d’une supercar.

Ce déploiement technique s’accompagne d’une politique tarifaire habile. La #5 débute à 46 600 euros, un prix compétitif au regard de son gabarit et de ses équipements. Même la version Brabus, sommet de la gamme, reste sous la barre des 62 000 euros, soit bien en dessous d’un Ford Mustang Mach-E GT, affiché à plus de 82 000 euros, et à un niveau comparable, voire légèrement inférieur, à celui d’un Tesla Model Y Performance. La Smart #5 s’impose donc comme un choix judicieux pour qui recherche un SUV familial puissant, spacieux et hautement technologique, sans vouloir complètement exploser le seuil des 60 000 euros (un chiffre qui parait fou lorsqu’on parle d’une Smart !).

 
la Smart #5
Le système est complet, mais certains éléments animés sont inutiles et perturbants / The good click

Une collaboration germano-chinoise assumée

Comme les #1 et #3, la Smart #5 est l’enfant d’un partenariat stratégique entre Mercedes-Benz et le groupe chinois Geely. Elle repose sur la plateforme SEA (Sustainable Experience Architecture), déjà utilisée par Zeekr, Polestar et Volvo. Sa production se déroule en Chine, ce qui entraîne des droits de douane importants à l’importation en Europe et l’empêche de bénéficier des bonus écologiques. Cependant, assumons de dire que cette origine orientale ne nuit en rien à la qualité perçue.

À l’ouverture des grandes portières, l’habitacle surprend agréablement. Les assemblages sont solides, les matériaux souvent moussés offrent un toucher plaisant et l’impression générale est celle d’une rigueur parfois supérieure à certains modèles européens se revendiquant premium. Même les zones soumises aux sollicitations répétées, comme l’accoudoir central qui intègre de nombreux rangements, affichent une stabilité remarquable. L’ensemble respire le sérieux et balaie rapidement les préjugés encore tenaces sur la production automobile chinoise.

la Smart #5

Équipement : peu de compromis

Un autre point fort de la Smart #5 est sa dotation de série. Alors que la plupart des constructeurs premium jouent avec les catalogues d’options et les packs pour gonfler les factures, Smart a choisi de simplifier l’approche. Dès les versions intermédiaires, la #5 est livrée avec une panoplie d’équipements impressionnante : sièges électriques et chauffants, grand écran central OLED de 13 pouces, combiné numérique complet, système audio Sennheiser de vingt haut-parleurs compatible Dolby Atmos, affichage tête haute, toit panoramique, pompe à chaleur, aide à la conduite semi-autonome incluant régulateur adaptatif, maintien de voie et caméras à 360 degrés. La seule véritable option au catalogue est une peinture mate. Clairement, la marque veut jouer la générosité plutôt que la complexité commerciale.

Le système multimédia, animé par une interface fluide et moderne, offre une richesse étonnante. Apple CarPlay et Android Auto sont intégrés en mode sans fil, et de nombreuses applications de divertissement sont disponibles dès la livraison, dont Apple TV+ et Amazon Prime Video. Des jeux vidéo en 3D sont même proposés, histoire de convaincre l’utilisateur qu’il entre dans une dimension ludique et technophile. Le passager avant dispose de son propre écran, indépendant, sur lequel il peut lancer des vidéos ou contrôler le multimédia. Cependant, on trouve dans l’interface des animations inutiles, tel ce lion avatar qui doit probablement inspirer une chose qui nous échappe. Il aurait mieux valu fait davantage la chasse aux petits bugs. Nous avons en effet relevé quelques dysfonctionnements, notamment avec CarPlay qui, sur certains modèles de test, refusait parfois de se lancer correctement. En Bluetooth simple, la musique se diffusait bien, mais les appels restaient cantonnés au téléphone plutôt qu’au système de la voiture. L’ergonomie des menus n’est pas toujours intuitive et la navigation GPS multiplie les alertes jugées infantilisantes, invitant à ralentir pour une série de virages même lorsque la vitesse est déjà très en deçà des limites autorisées. Cette volonté de surprotéger le conducteur peut paradoxalement devenir source de distraction, et donc de danger. En tous les cas, disons simplement que c’est pénible.

 Vie à bord : tournée vers le confort

À l’intérieur, l’ambiance diffère des canons habituels du sérieux germanique. Les formes arrondies, les jeux de lumière et l’omniprésence des écrans créent un univers moderne et chaleureux, parfois jugé un peu clinquant mais incontestablement en phase avec les attentes d’une clientèle attirée par la technologie.

À l’avant, les sièges en Dinamica, un textile synthétique rappelant l’Alcantara, se montrent moelleux et confortables. Chauffants dès les finitions intermédiaires, ils leur manquent toutefois la ventilation et la fonction massage qui sont toujours appréciables sur de longs trajets. À l’arrière, l’espace est royal : les jambes disposent d’une place rare, et la garde au toit généreuse renforce la sensation de volume. Les dossiers des sièges sont inclinables électriquement et, luxe supplémentaire, le passager arrière droit peut contrôler le siège avant, comme dans une limousine. Un accoudoir central, un toit panoramique occultable électriquement et un compartiment réfrigéré dans la console centrale viennent compléter une expérience tournée vers le confort et la convivialité.

la Smart #5

Sur la route, entre douceur et puissance

Au volant, la Smart #5 surprend par sa double personnalité. Sa puissance, notamment dans la version Brabus de 646 chevaux, est tout simplement phénoménale. Les accélérations sont dignes d’une sportive, mais la voiture reste étonnamment sage dans son comportement. La gestion électronique permet de doser la réponse à l’accélérateur, rendant la conduite urbaine parfaitement gérable malgré la cavalerie sous le capot.
Le châssis est calibré pour offrir un bon compromis entre stabilité et confort. Les mouvements de caisse sont contenus, mais les suspensions demeurent assez souples, ce qui limite les velléités sportives en conduite dynamique. Sur autoroute cependant, ce typage confortable prend tout son sens et rend les longs trajets particulièrement agréables. En revanche, devoir passer par l’écran central pour ajuster le niveau de récupération d’énergie à la décélération n’aucun sens : une commande physique dédiée aurait été bien plus pratique.

Recharge et consommation : deux visages opposés

L’un des grands arguments de la Smart #5 est sa capacité de recharge. Grâce à son architecture 800 volts et à sa batterie NMC, elle peut accepter jusqu’à 400 kW en courant continu. Dans l’idéal, cela permet de passer de 10 à 80 % de charge en moins de vingt minutes. En courant alternatif, le chargeur embarqué de 22 kW (11 kW sur l’entrée de gamme) facilite la recharge rapide sur les bornes publiques du réseau secondaire. La compatibilité avec les technologies Plug & Charge et V2L, permettant d’alimenter des appareils externes, renforce encore la polyvalence du modèle.
Mais à côté de cet atout se cache un talon d’Achille : la consommation. Avec plus de 2,3 tonnes sur la balance et une aérodynamique loin d’être idéale, la Smart #5 se montre gourmande. Les valeurs officielles annoncent entre 18,4 et 19,9 kWh aux 100 kilomètres, mais en conditions réelles, il n’est pas rare de constater entre 24 et 31 kWh selon le relief et le style de conduite. Dans le cas de la version Brabus, l’autonomie réelle tombe parfois sous la barre des 300 kilomètres, bien loin des 540 à 590 kilomètres théoriques.

 
la Smart #5

Le verdict d’une mue radicale

La Smart #5 est sans doute la plus aboutie et la plus ambitieuse des nouvelles Smart. Elle rompt avec l’image des micro-citadines et assume pleinement son statut de SUV familial haut de gamme, puissant, spacieux et généreusement équipé. Certes, tout n’est pas parfait : la consommation élevée, le poids conséquent, l’absence de bonus écologique et une ergonomie perfectible tempèrent l’enthousiasme. Mais face à ces critiques, elle oppose des arguments solides : une finition irréprochable, un confort de premier plan, une recharge ultrarapide, une habitabilité exceptionnelle et un rapport prix/prestations difficile à battre.
En somme, la Smart #5 incarne la métamorphose d’une marque qui n’a plus peur de tourner la page de ses modèles emblématiques. Reste à savoir si le public suivra cette nouvelle orientation et acceptera d’associer le nom Smart à un grand SUV électrique, plutôt qu’à la petite citadine qui a marqué les esprits au début des années 2000.

Photos : The Good Click

Les clés de la Smart #5

Dimensions (Lxlxh)

4,71x1,92x1,71 m.

Masse à vide (modèle essayé)

2 378 kg

Énergie

Électricité

Moteur(s)

2 Électriques (Synchrone à aimant permanent)

Puissance maxi (modèle essayé)

637 ch / 475 kW

Couple maxi

710 Nm

Transmission

Aux quatre roues

Boite de vitesse

réducteur 1 rapport

Capacité Réservoir/Batterie

-/94 kWh

Conso mixte (min/max WLTP)

18,4/19,9 kWh/100 km

Prix d'accès à la gamme (au lancement)

46 600 €

Alexandre Lenoir

Plus de 30 ans de presse tech et auto n'ont pas entamé sa motivation. Alexandre teste passionnément tout ce qui roule et se connecte, tout en conservant un regard critique. Pour lui, la bonne techno est celle qui est avant tout utile !

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